Note de synthèse: dispositions concernant les laboratoires dans le projet de Loi relatif à la Santé (n°2302)

Le projet de loi de modernisation de notre système de santé bénéficie d’une procédure accélérée engagée par le gouvernement depuis le 16 mars 2015. Déposé à l’Assemblée nationale le 15 octobre 2014, ce projet a été adopté par celle-ci en première lecture le 14 avril 2015. Le texte a été transmis au Sénat le 15 avril 2005 et confié aux rapporteurs nommés le jour même.
Trois sujets concernent les laboratoires :
• l’application des règles de territorialité aux laboratoires de biologie médicale
• la transparence des liens entre professionnels et laboratoires
• les mesures de modernisation des groupements de coopération sanitaire

1/ L’application des règles de territorialité aux laboratoires de biologie médicale.

L’article 38 du projet de loi réécrit l’article L.1434-8 du code de la santé publique (CSP) de la façon suivante :
« L’agence régionale de santé délimite :
1° Les territoires de démocratie sanitaire à l’échelle infrarégionale de manière à couvrir l’intégralité du territoire de la région ;
2° Les zones donnant lieu :
a) À la répartition des activités et équipements mentionnés à l’article L. 1434-3 ;
b) À l’application aux laboratoires de biologie médicale des règles de territorialité définies aux articles L. 6211-16, L. 6212-3, L. 6212-6, L. 6222-2, L. 6222-3, L. 6222-5 et L. 6223-4.
Lorsque certaines actions à entreprendre dans le cadre des territoires de démocratie sanitaire ou des zones mentionnées au 2° du présent article le nécessitent, le directeur de l’agence régionale de santé peut conclure, à titre dérogatoire, avec un ou plusieurs directeurs d’agence de santé, un contrat interrégional ».

Le projet d’article L.1434-8, 2° précise ainsi, dans son § b), que l’ARS délimite les zones donnant lieu à l’application des règles de territorialité relatives aux laboratoires de biologie médicale. Leur activité est en effet soumise à des règles de territorialité précises, déjà en vigueur et définies aux articles L. 6211-16, L. 6212-3, L. 6212-6, L. 6222-2, L. 6222-3, L. 6222-5 et L. 6223-4 CSP.

Aucun des travaux parlementaires à ce jour ne permettent de définir les « zones » telles qu’introduites dans la loi.

Ces règles prévoient notamment que les laboratoires participent à la permanence de l’offre de biologie médicale définie sur le territoire de santé et soumettent l’évolution de l’offre de santé aux schémas régionaux d’organisation sanitaire ainsi qu’à la délimitation des territoires de santé. En outre, le directeur général de l’ARS peut s’opposer à l’ouverture d’un laboratoire de biologie médicale, lorsqu’elle aurait pour effet de porter l’offre d’examens de biologie médicale à un niveau supérieur de 25 % à celui des besoins de la population du territoire. Il peut également s’opposer, pour des motifs tenant au risque d’atteinte à la continuité de l’offre de biologie médicale, à une opération d’acquisition d’un laboratoire de biologie médicale ou d’un site de laboratoire de biologie médicale, à une opération de rachat de tout ou partie d’actifs d’une société exploitant un laboratoire de biologie médicale ou encore à une opération de fusion de laboratoires de biologie médicale.
Le dernier alinéa est issu de l’adoption de l’amendement n°1456. Cet amendement a été motivé par le fait que la mise en œuvre de certaines actions ne peut valablement être assurée à l’échelle d’un territoire de santé ou de plusieurs territoires infrarégionaux, notamment dans les régions Antilles-Guyane. En effet, dans certaines hypothèses, qu’il s’agisse de la répartition des laboratoires de biologie médicale (prévue par l’article L. 6222-5 CSP) ou, par exemple, de la mise en œuvre de campagnes de démoustication, la mise en commun de moyens, dans le cadre de plusieurs régions, doit pouvoir être autorisée.

2/Habilitation à prendre par ordonnance des mesures de modernisation des groupements de coopération sanitaire

Le titre V du projet de loi relatif à des « mesures de simplification » contient un article 50 concernant la coopération entre établissements ou professionnels dans le cadre d’un groupement de coopération sanitaires (GCS). Cette disposition prévoit :

« I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution et dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance des mesures relevant du domaine de la loi permettant de faciliter la constitution et le fonctionnement des groupements de coopération sanitaire et visant à : 1° Adapter les conditions de création, d’organisation et de fonctionnement des groupements de coopération sanitaire et à clarifier les modalités de détention et d’exploitation d’autorisations, notamment de soins, par un groupement de coopération sanitaire ; 2° Définir le régime des mises à disposition des agents des établissements publics de santé membres d’un groupement de coopération sanitaire et à étendre aux groupements de coopération sanitaire de moyens de droit public, au sens du 1 du I de l’article L. 6133-3 du code de la santé publique, s’agissant des instances représentatives du personnel, l’application de l’article L. 4111-1 du code du travail et de l’article L. 6144-3 du code de la santé publique ; 3° Adapter le régime fiscal des groupements de coopération sanitaire et à faciliter l’exploitation par ces groupements d’une pharmacie à usage intérieur et d’activités biologiques d’assistance médicale à la procréation ; 4° Supprimer, dans le code de la santé publique, les références aux fédérations médicales hospitalières et à modifier les dispositions relatives aux groupements de coopération sanitaire à l’article 121 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit.
II. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance prévue au présent article ».

Cette disposition s’inscrit dans un mouvement de simplification et d’ajustement de la législation relative aux GCS, qui constituent un outil privilégié de coopération opérationnelle entre établissements, ou entre établissements et acteurs ambulatoires (cabinets d’imagerie médicale ou de radiothérapie par exemple, mais aussi laboratoires de biologie médicale).

Cet article donne au gouvernement la possibilité de prendre des mesures utiles par voie d’ordonnance dans un but de simplification ou d’adaptation du droit des GCS sur des questions précises et techniques.

Notamment, le 3° prévoit l’adaptation du régime des GCS en vue de faciliter l’exploitation par les GCS de pharmacies à usage intérieur et d’activités biologiques d’assistance médicale à la procréation.

Précisément, un laboratoire de biologie médicale (LBM) peut être exploité par un GCS conformément à l’article L. 6223-2 CSP. Cependant, les activités biologiques d’assistance médicale à la procréation (AMP) se voient appliquer le régime des autorisations d’activité de soins conformément aux articles L. 2142-1 alinéa 4 et R. 6122-25 17° CSP. Or, un GCS, dès lors qu’il est titulaire d’une activité de soins, est érigé en « établissement de santé » (article L. 6133-7 CSP). Dans ce sens, la constitution d’un GCS ayant pour objet l’exploitation d’un LBM commun à plusieurs établissements de santé impose qu’il soit, d’une part autorisé à pratiquer ces activités, et d’autre part qu’il soit érigé en « établissement de santé », tandis que les laboratoires de ville/privés, quoiqu’également soumis au régime des autorisations, peuvent quant à eux exercer ces activités sans pour autant être érigés en « établissement de santé ». Il convient donc de permettre à ces GCS d’exercer des activités biologiques d’AMP sans pour autant les soumettre, au préalable, au statut obligatoire de « GCS- établissements de santé ».

3/ La présence de biologistes au sein des LBM Les amendements relatifs à la présence des biologistes dans les LBM ont tous été rejetés ou n’ont pas été soutenus :

http://www.assemblee-nationale.fr/14/amendements/2673/AN/810.asp
http://www.assemblee-nationale.fr/14/amendements/2673/AN/976.asp
http://www.assemblee-nationale.fr/14/amendements/2673/AN/1094.asp
http://www.assemblee-nationale.fr/14/amendements/2673/AN/1338.asp
http://www.assemblee-nationale.fr/14/amendements/2673/AN/1449.asp
http://www.assemblee-nationale.fr/14/amendements/2673/AN/2037.asp

Aussi, l’article L6222-6 du code de la santé publique, issu de la loi n° 2013-442 du 30 mai 2013 portant réforme de la biologie médicale, reste le même, à savoir :
« Sur chacun des sites, un biologiste du laboratoire doit être en mesure de répondre aux besoins du site et, le cas échéant, d’intervenir dans des délais compatibles avec les impératifs de sécurité des patients. Pour assurer le respect de cette obligation, le laboratoire doit comporter un nombre de biologistes au moins égal au nombre de sites qu’il a créés. Le biologiste assumant la responsabilité du site doit être identifiable à tout moment ».

Les projets d’amendements proposaient cette nouvelle rédaction :

« Art. L.6222-6. – Au moins un biologiste médical exerce sur chacun des sites du laboratoire de biologie médicale aux heures d’ouverture de ce site. Pour assurer le respect de cette obligation, le laboratoire doit comporter un nombre de biologistes médicaux supérieur au nombre de sites qu’il a créés.

« L’alinéa précédent ne s’applique pas aux heures de permanence de l’offre de biologie médicale. Toutefois, aux heures de permanence, un biologiste médical est en mesure d’intervenir dans le délai nécessaire aux besoins des patients et à la bonne organisation du laboratoire. Le biologiste médical assumant la responsabilité du site est identifiable à tout moment. »

Céline Roquelle-Meyer
Avocate à la Cour